Raconte-moi la radio

Le Métropolitain

Il y a 120 ans, Paris rêvait d'un transport en commun urbain

Dès la seconde moitié du 19ième siècle, la circulation, dans Paris comme dans d'autres grandes villes du monde (Londres, New-York, ....), devient problématique. A partir de 1845, des projets de transport en commun local sont présentés aux Autorités publiques désireuses de résoudre ce phénomène récursif d'encombrement des rues.

Diverses solutions sont envisagées, du train à vapeur classique dérivé du chemin de fer au monorail pendulaire suspendu au dessus des immeubles en passant par des solutions plus utopistes comme le wagon en forme de piston propulsé par de l’air comprimé dans un tunnel en forme de boyau.

Après l'examen d'un certain nombre de projets plus ou moins ambitieux de construction d'un moyen de transport en commun dans Paris, un décret d’utilité publique de 1898, autorise l’établissement d’un chemin de fer métropolitain d’intérêt local à traction électrique.

Le réseau initial, d’une longueur de 65 kilomètres, sera au gabarit de 2,40 m. Cette largeur, inférieure à celle du matériel des grandes compagnies de chemin de fer (gabarit standard de 3,20 m), sera sensée mettre les futures exploitants à l'abri de toute intrusion du train dans leurs affaires.

Le même argument aurait prévalu semble-t-il pour le choix du sens de circulation des rames, (choix non retenu pour le RER entre autre qui est relié au réseau ferroviaire).

Fulgence BIENVENUE

L'année suivante, la Compagnie Générale de Traction appartenant au baron Empain s'associe avec les Etablissements Schneider du Creusot pour fonder la Compagnie du Chemin de fer Métropolitain de Paris (CMP).

Sous la haute autorité de Fulgence BIENVENUE (1852-1936), Inspecteur Général des Ponts et Chaussées, cette compagnie va construire les infrastructures du réseau et en assurera par la suite l'exploitation.

La première ligne de métro est ouverte au public le 19 juillet 1900 peu après l'ouverture de l’Exposition Universelle de Paris (Ligne N° 1 Porte de Vincennes - Porte Maillot).

Un des plus importants noeuds de correspondance du métro rappelle aujourd'hui le nom du "père du métropolitain parisien" (Station "Montparnasse Bienvenüe" au carrefour des lignes 4, 6, 12 et 13).


Ce que l'on sait moins, c'est que la ligne N° 1 avait été tracée pour permettre aussi aux visiteurs français et étrangers de prendre part aux épreuves des Jeux Olympiques d'été qui se déroulaient au Bois de Vincennes et qui faisaient partie des festivités proposées par l'Exposition Universelle de Paris de 1900 (24 nations participantes, 90 épreuves dans 19 sports). Un vélodrome d'une capacité de 40 000 places avait été construit à cette occasion (aujourd'hui vélodrome Jacques Anquetil dit "la Cipale"). Gardons en mémoire aussi, que le tracé de la ligne N° 1 avait été justifié par une voloné politique d'étendre Paris vers l'Est.

Les rames de métro fonctionneront à l'électricité.

De l'électricité pour le Métro !

Au démarrage de l'exploitation du réseau parisien, l'électricité nécessaire à l'alimentation de la première ligne (ligne N° 1 Porte de Vincenne - Porte Maillot), ouverte pour l'exposition Universelle de 1900, est fournie par des producteurs locaux (d'abord par l'usine de la Compagnie parisienne de l'Air Comprimée située Quai Jemmapes puis Le Triphasé d'Asnières et l'usine des Moulineaux de la Compagnie Générale de Traction). Mais la CMP a prévu de produire par la suite elle-même son énergie et son usine est même en fin de construction.

Cette première unité de production électrique entrera en service en mars 1901.

L'usine est construite entre le Quai de la Rapée et la rue de Bercy, derrière le bâtiment administratif qui est lui en façade en bord de Seine. Elle disposera directement de l'eau de refroidissement pour les condenseurs des machines à vapeur à partir du fleuve.

Son emplacement exact était 177 et 179 rue de Bercy (emplacement situé entre la Gare de LYON et l'actuel Palais Omnisports de Paris-Bercy).



L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Chef d'oeuvre de l'architecte industriel Paul Friésé
Bâtiment construit en 1900


L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Les immenses cheminées vues de la Seine
Au fond, la tour de l'horloge de la gare de LYON


L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Vue arrière côté rue de Bercy
Au fond, le bâtiment administratif - Architecte Paul Friesé

Cette centrale comprendra 2 bâtiments accolés, l'un abritant les chaudières et l'autre les machines à vapeur et les génératrices électriques.

18 chaudières (3 groupes de 6 séparés par des réservoirs d'eau d'alimentation et les cheminées) assureront la production de vapeur. Elles seront chauffées au charbon. Le combustible sera déchargé de péniches amarées en bord de Seine puis transporté par des tapis roulants, en partie sous-terrains, jusqu'aux aires de stockage (système Burton).



Plan de l'usine de Bercy
Revue Le Génie Civil de 1901

La bâtiment administratif est relié à l'usine par une passerelle à hauteur du premier étage. Deux salles de batteries sont installées en sous-sol de cette construction. Les étages supérieurs assurent le logement de la Direction du site et des électriciens et mécaniciens de permanence.



L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Vue depuis la gare d'Austerlitz
Au fond, les cheminées de la Centrale Electrique


L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Transporteur de charbon - Système Burton
Installé en bord de Seine vers 1900

La société BURTON'STEEL, spécialiste de la manutention de vrac, existe encore de nos jours et travaille notamment dans les secteurs de l’industrie chimique, des sucreries, des activités céréalières et verrières, des cimenteries et des entreprises de travaux publics. Elle reste un des grands spécialistes mondiaux en matière de transporteurs à bandes, élévateurs à godets, vis d'Archimèdes, silos et trémies.

L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Un des 3 groupes de 6 chaudières
au premier plan les réservoirs d'alimentation en eau
Du charbon est visible en bas à gauche de la photo devant les soutes à charbon


L'usine génératrice d'électricité de Bercy
Les monteurs finissent la construction des chaudières
Photo prise mi-février 1901 - Image Revue Le Génie Civil

A l'avant des chaudières se trouvaient les soutes à charbon d'une capacité de 2,000 tonnes.



Salle des machines de l'usine de Paris-Bercy
Vue sur les génératrices et les machines à vapeur

Comme on peut le voir sur les photos ci-dessus, les machines à vapeur étaient de type vertical compound et à condensation. Leur vitesse de rotation était de 70 t/min, vitesse nécessaire à la production d'un courant alternatif à 25 Hz (25 périodes/s).

Ces machines très lourdes étaient montées sur d'énormes massifs en béton enfoncés jusquà 12 m dans le sol. La réalisation de ces massifs avait nécessité la mise en oeuvre de caissons à air comprimé - technique employée pour la construction de la Tour Eiffel.

La salle des machines était dimensionnée pour recevoir 4 groupes de production. Au départ 3 alternateurs seulement étaient installés (puissance unitaire 1,500 kW, tension 5,000 V triphasé, fréquence 25 Hz, dimensionnement 2,000 kVA), une place étant libre pour une extension ultérieure.

Une dynamo permettait de fournir une puissance de 1500 kW sous 650 V avec des écarts de tension ne dépassant pas 5% quelque soit la charge.

Il y avait aussi dans la salle des machines, côté rue de Bercy, 3 groupes de transformation à commutatrices (qu'on retrouvera sous le nom de sous-station de la Rapée).

Ces groupes d'une puissance unitaire de 750 kW étaient composés d'un transformateur abaisseur de tension (5000 V/430 V) suivi d'une machine tournante transformant le courant alternatif monophasé 430 V en courant continu 650 V.

Les transformateurs à colonnes (3 transformateurs monophasés par groupe) d'un poids unitaire de 6 tonnes étaient connectés côté primaire en triangle, les secondaires étant indépendants. Ils étaient ventilés artificiellement de façon à assurer leur refroidissement.

Les commutatrices hexapolaires tournaient à 250 t/min. Chaque machine avait un poids de 26 tonnes. Ces machines comportaient un moteur à courant alternatif 430 V et une dynamo 630 V couplés sur le même arbre avec les machines auxiliaires d'excitation.

Elles étaient mises en route comme un moteur à courant continu par alimentation sur le réseau continu du côté de la dynamo puis connectées avec les alternateurs à la vitesse de synchronisation du côté du moteur à courant alternatif.



Salle des machines de l'usine de Paris-Bercy
Vue sur les commutatrices et les transformateurs abaisseurs de tension au premier plan
En haut à droite le panneau de commande

Il y avait aussi dans la salle des machines des dynamos auxiliaires dont des groupes dit groupes survolteurs - fournissant de 0 V à +/- 25 V - dont la fonction était d'assurer un équilibrage en tension des batteries tampon suivant le régime de courant continu demandé par la ligne de métro et de façon à ce que la puissance des groupes électrogènes soit la plus constante possible.

Ce descriptif très technique, sans doute un peu difficile à appréhender pour un lecteur non électricien, a pour but de montrer la complexité qu'il y avait (et à n'en pas douter qu'il y a encore) à coupler ensemble deux "mondes électriques" très différents - le monde du Courant Continu cher à Monsieur Edison et le monde du Courant Alternatif défendu par Monsieur Tesla dans les années 1890, juste une dizaine d'année avant la construction de l'usine de Bercy. Difficulté maximisée dans le cas de la gestion d'un réseau de métro par le fait des variations des paramètres électriques (tension Vs courant) induites par la variabilité du trafic ferroviaire (fréquences des arrêts /démarrage des rames, nombre de rames en service, ....). On peut imaginer la complexité d'une telle gestion à notre époque ! Merci sans doute à l'informatique qui apporte une aide indispensable à l'obtention de la meilleure disponibilité possible du service.

Station Barbès - Sous-station Bastille

Courant Alternatif ! Courant Continu ! AC-DC ! Risques d'électrocution ! Coût d'exploitation ! Pertes en ligne !

Moteurs asynchrones ? moteurs à collecteur ? excitation série ou en dérivation ? résistances de démarrages ?

Quelles technologies retenir pour ce nouveau métro parisien ?

La guerre des clans va-t-elle recommencer ?

Non bien sûr ! Edison et Tesla avaient sans doute tous deux raison et le métro utilisera le courant alternatif pour amener l'énergie au plus près des besoins et le courant continu pour assurer une certaine sécurité des voyageurs.

Le schéma électrique du métro adoptera le concept de sous-stations pour assurer le lien entre les deux types de courants.

Le courant alternatif moyenne tension fourni par les producteurs externes ou par la centrale de Bercy sera transporté au plus près des zones d'utilisation puis transformé dans des installations locales appelées sous-stations en courant continu. Ce courant continu arrivera directement sur les rails pour alimenter les rames de métro. La tension de ce courant continu fixée à une valeur assez basse (615 V puis plus tard 750 V) rendra les installations moins dangereuses pour le public (risque d'électrocution en cas de chute sur les rails par exemple), mais sera quand même assez haute pour limiter le courant compte tenu des puissances demandées par les moteurs de traction des wagons. Les prescriptions constructives recommandaient par ailleurs de ne pas dépasser des distances d'alimentation en courant continu supérieures à 4 ou 5 km de façon à limiter les pertes de puissance en ligne. Pour assurer une alimentation correcte de l'ensemble du réseau parisien envisagé à l'époque, les techniciens avaient estimé qu'il serait nécessaire de construire une trentaine de sous-stations dans Paris intra-muros.

Le courant continu, en plus de son avantage vis à vis de la sécurité du public permettait d'équiper les rames de moteurs plus faciles à adapter à des démarrages et arrêts fréquents que les moteurs asynchrones classiques. Certains se souviennent sans doute des anciennes rames de métro (type Sprague-Thomson) dans lesquelles les moteurs électriques étaient alimentés en direct sur le réseau et étaient contrôlés par une combinaison de résistances et de relais qui connectaient les moteurs en parallèle ou en série lors des arrêts et redémarrages à partir du commutateur de commande du conducteur.



Loge du conducteur d'une rame de métro
à gauche vue vers l'avant
à droite le panneau électrique avec les sectionneurs et le relayage de commande des moteurs

Quand on voyageait près du poste de pilotage en tête de rame, on entendait très bien, dans le brouhaha général, le crépitement des relais. On pouvait même voir parfois par la vitre de la cabine quelques belles gerbes d'étincelles au moment de la commutation !

La ligne N° 1 sera alimentée au départ à partir de 2 sous-stations branchées en parallèle. La première implantée à l'Etoile, vaste cathédrale creusée sous terre, sera raccordée à la partie Ouest de la ligne.

La partie Est sera raccordée à la sous-station de la Rapée installée dans un bâtiment attenant à l'usine de Bercy.

Chaque sous-station comportait au départ 2 commutatrices de 750 kW et des batteries d'accumulateurs pour l'éclairage.

Il y avait bien sur, en plus, tous les matériels nécessaires à l'exploitation des machines tournantes (circuits de refroidissements, ventilations, graissage, ...) et à la gestion de la distribution électrique (sectionneurs, disjoncteurs, matériels de surveillance et de régulation, dynamos pour charger les batteries, ...)

En raison de l'accroissement du trafic de la ligne N° 1, il sera rapidement nécessaire d'implanter une troisème station au niveau du Louvre.

La photo ci-après donne une idée de l'implantaion de ces structures techniques imposantes.



La sous-station Etoile
Les groupes convertisseurs tournants

La disponibilité du Métro et la Sécurité des voyageurs

Après la catastrophe de Couronnes en 1903 (84 morts suite à un incendie dû à un court-circuit électrique), la CPM modifie ses schémas d'alimentation électrique de lignes en les découpant en plusieurs tronçons alimentés par plusieurs sous-stations et protégés par des coffrets de déclenchements capable de couper instantanément le courant en cas de danger (avertisseurs d'alarme).

Elle améliore les rames d'origine en bois (la loge de conduite passe du bois au fer) et fait développer les rames entièrement métalliques, connues sous le nom de Sprague-Thomson, qui seront mises en service vers 1908 (voitures vertes pour la deuxième classe et rouge pour la première classe) et construites jusqu'en 1938.



Rame Sprague-Thomson
Près de la station Barbès

Pour mémoire les dernières rames Sprague-Thomson seront retirées de la circulation dans les années 1980. Elles auront, pendant au moins trois générations, symbolisé le métro de Paris et ont figuré dans pas mal de films.

La CMP profite aussi de cette évolution technique pour fiabiliser ses alimentations électriques et diversifier ses sources d'approvisionnement. Dès 1906, elle fait appel à des moyens de production extérieurs (centrales de St-Denis et Ivry puis plus tard Vitry).

Dans les années 1925, d'importants travaux sont envisagés à Bercy pour permettre le passage du 25 périodes au 50 périodes, mais l'importance des coûts ne justifie pas le maintient en exploitation de la centrale qui est en fin de vie.

A noter que les travaux pour le passage du 25 Hz au 50 Hz imposé par les Pouvoirs Publics en 1921, commenceront sur le réseau du métro en 1926 et se termineront en 1934. Ils s'étaleront ainsi sur 8 années. Ce long programme donne une idée de l'importance et du coût des travaux à réaliser, de la difficulté de les programmer (maintien du service du métro) et des études techniques préalables à mener. On peut imaginer que de nos jours un changement de la fréquence du réseau européen serait totalement impensable. On comprend ainsi pourquoi aujourd'hui par exemple un grand pays industrialisé comme le Japon vit avec deux réseaux distincts ; un en 60 Hz (Japon occidental - Osaka) et l'autre en 50 Hz (Japon oriental - Tokyo).

L'usine de Bercy sera arrêtée définitivement en décembre 1927.

A l'aube de la Grande Guerre, après la réalisations de travaux audatieux et novateurs nécessités entre autre par le franchissement de la Seine et le creusement dans des sols instables, 10 lignes de métro sont en exploitation. Le réseau couvrent déjà presque 100 km.

Au fure et à mesure de l'augmentation du nombre de ces lignes et donc des besoins en électricité, de nouvelles sous-stations d'alimentation ont vu le jour.

En 1914, il y en aura déjà une quinzaine en exploitation et la station de la Rapée sera même déjà remplacée par celle de la Bastille.

Les contraintes géogaphiques conduisent la CPM à construire ces ensembles techniques en surface et en plein coeur de la capitale où le "beau" était de mise.

Elle fait appel aux meilleurs architectes de l'époque de façon à intégrer au maximum ces bâtiments techniques dans le paysage urbain.

L'architecte Paul Friesé qui avait dessiné l'usine de Bercy est mis à contribution pour concevoir ces sous-stations en usant de structures porteuses en acier pour ménager un espace au sol maximum nécessaire à l'implantation des grosses machines tournantes, tout en permettant l'aménagement de larges ouvertures propices à l'éclairage des lieux, à l'aération et à l'évacuation des calories produites.

La sous-station Bastille encore visible de nos jours restera sans doute le chef-d'oeuvre architectural de Friesé et un exemple d'intégration de structures industrielles en milieu urbain.



La sous-station Bastille
La façade - oeuvre de l'architecte Paul Friesé (construction 1910)

La photo ci-dessous montre les groupes convertisseurs de la sous-station du Père-lachaise. Les groupes tournants de conception Thomson-Houston avaient une puissance unitaire de 750 kW. La partie dynamos de type hexaphasées - vitesse de rotation 300 t/min - fournissaient du courant continu sous 750 V avec un courant à pleine puissance d'environ 1,000 Ampères.



La sous-station du Père Lachaise - mise en service en 1903
Les groupes convertisseurs tournants
Alimentation des lignes 2 et 3 - 3750 kW


La sous-station du Père Lachaise en 1936
Vue sur les collecteurs des groupes convertisseurs

Le style Friesé restera d'actualité jusque dans les années 1935, date à laquelle le béton va commencer à s'imposer dans la construction industrielle en remplacement de l'acier riveté cher à M. Eiffel.

La technique évolue

Mais les techniques de l'électricité vont aussi évoluer. Les grosses machines tournantes de conversion du courant alternatif en courant continu vont être remplacées par des convertisseurs statiques à vapeur de mercure de taille bien plus petite ce qui permettra de construire des sous-stations plus discrètes dans le paysage parisien. Imaginez que pour la même puissance électrique un convertisseur rotatif qui utilisait au sol une surface de 1,000 m2 pourra être remplacé par un convertisseur statique qui ne demandera que 100 m2. Les anciennes stations vont se transformer en espaces quasi vides !

Dès 1923, suite à des essais concluant sur une installation teste de 2 groupes redresseurs de 540 kW au terminus Nation de la ligne N° 2, la CMP décida de généraliser l'emploi des redresseurs à mercure tout en conservant par mesure de sécurité un certain nombre de convertisseurs tournants. En 1952, on comptera 32 sous-stations dont 20 à commutatrices et 12 à redresseurs à mercure. En 1968, il restera encore 14 sous-stations à commutatrices en service !

Sous-station équipée de convertisseurs statiques
à vapeur de mercure


Sous-station d'Auteuil - 1936
Convertisseurs statiques à vapeur de mercure
Reproduction de l'ouvrage de JeanVIRGITTI

Les sous-stations disposent d'immenses salles de batteries de secours qui participent au maintien et à la sécurité du réseau ferré ainsi qu'a des fonctions d'éclairage de secours.

De nos jours, les énormes batteries des sous-stations ont été supprimées et remplacées par des groupes électrogènes à démarrage automatique. Par mesure d'extrême sécurité, un circuit en courant continu d'éclairage dit de jalonnement pour les indicateurs de sortie des quais est assuré par de petites batteries rechargées automatiquement.

La sous-station Laborde
Salle des batteries - vers 1936

Le concept de sous-stations disparaitra définitivement dans les années 1960.

et en l'an 2000

De nos jours, le réseau de la RATP est alimenté par ERDF en 63,000 V et 25,000 V 50 Hz à partir de 7 points de distribution (Postes Haute Tension - PHT) répartis autour de Paris.

Ces PHT sont équipés de groupes diesel ou de turbine à gaz de secours.

Le courant Haute tension est traité dans des Postes de Redressement (PR dans le jargon de la RATP) pour être converti, grâce aux composants électroniques modernes (thyristors), en courant continu de tension 750 V. Cette disposition en plus de son caractère moins dangereux que l'emploi du courant alternatif Haute Tension, présente aussi l'avantage de moins perturber les circuits électroniques modernes surtout en milieu sous-terrain où le passage des cables est une contrainte forte et où courants forts (puissance pour la traction) et courants faibles (circuits de contrôle-commande et électronique de terrain) se côtoient souvent pour des problèmes d'installation dans les tunnels.

La tension de 750 V utilisée pour la traction électrique alimentée par un troisième rail semble assez standard. On la retrouve par exemple en France sur le réseau du métro de LYON, sur celui de MONTREAL au Québec et sur de nombreuses lignes du Sud de l'Angleterre. On trouve aussi en Angleterre des solutions à 4 rails avec un rail latéral alimenté en 420 V et un rail central alimenté en - 210 V ce qui permet une tension totale de 630 V pas très éloignée des 750 V. Certaines lignes comportent de tronçons mixtes avec une alimentation par caténaire dans les parties aériennes et une alimentation par troisième rail dans les tunnels. On retrouve aussi l'utilisation du troisième rail dans des zones urbaines comme à Singapour par exemple où la mise en place de caténaires est interdite par la règlementation pour des raisons environnementales et de gène visuelle. A noter que le troisième rail présente un certain nombre d'inconvénients : limitation de la puissance, de la vitesse et sensiblité aux intempéries en utilisation sur des réseaux extérieurs. On connait bien, à Paris, les dérèglements de service qui surviennent parfois en hiver lors de chutes de neige par exemple.

Le troisième rail et le frotteur d'une rame Sprague-Thomson
Détail de conception du dispositif de prise de courant pour les moteurs électriques

Autre élément historique, sans doute moins connu : dans les années 1872, le bey de Tunis décide de faire installer un train pour se rendre confortablement dans ses différents palais autour de Tunis. Ainsi va naître vers 1875, le Tunis-Goulette-Marsa appelé communément, depuis 1905 date de l'inauguration du premier tronçon, le TMG. D'abord exploité par une compagnie anglaise, le réseau sera repris par différentes sociétés et vers 1905, la direction générale des travaux publics remplacera la traction à vapeur par la traction électrique sur le modèle du métro de Paris : alimentation des rames par un troisième rail en 600 volts continu et voitures en bois. En 1989, le troisième rail sera remplacé par une caténaire alimentée en 750 V continu.

Le TMG - Tunis-Goulette-Marsa
La ligne en gare de Carthage
CPA Neurdein Frères Imp. Crété - Paris-Corbeil vers 1910

En 2008, la consommation annuelle du métro parisien (environ 1,4 milliard de kilowatt-heures) était équivalente à celle d'une ville comme Nice. La puissance de pointe dépasse 250 MW.

Les trains, en France et dans d'autres pays d'Europe, utilisent des voies à écartement standard (1450 mm) avec alimentation par caténaire et captage par pantographe en Haute Tension alternative compte tenu des puissances demandées. Le 25 kV alternatif monophasé 50 Hz est dorénavant utilisé sur le réseau ferré français. Au niveau de la motorisation, les TGV par exemple ont utilisé différents types de moteurs au fure et à mesure de l'évolution des systèmes de redressement de puissance. À la fin des années 1980, le développement de ce type d'électronique a permis de substituer le moteur synchrone au moteur à courant continu. Ces moteurs sont d’abord alimentés à l’aide d’onduleurs de courant à thyristor (1988). À cette époque l’électronique de puissance nécessaire à leur alimentation est beaucoup plus simple que celle requise par les moteurs asynchrones. Néanmoins, le moteur synchrone est plus coûteux et nécessite plus d’entretien que le moteur asynchrone. Avec les progrès de l’électronique de puissance (onduleur de tension à transistor bipolaire à grille isolée - Insulated Gate Bipolar Transistor - IGBT), ce dernier va supplanter le moteur synchrone dès le milieu des années 1990 dans quasi tous les domaines de la traction. Ce type de motorisation est installé sur les motrices de l’Eurostar, avec des thyristors GTO (Thyristor à extinction par la gâchette - Gate Turn-Off Thyristor), et maintenant sur le TGV Paris Est, avec des IGBT. Le métro qui n'utilise pas de système d'alimentaion électrique par caténaire, mais une alimentation par un troisième rail, ne peut pas techniquement et pour les raisons invoquées dans les paragraphes précédents, utiliser le courant alternatifs Haute tension et conserve le courant continu. Certains trains londoniens utilisent la même configuration à 3 rails sans caténaire.

Ancienne rame de métro - 1909
Vue sur les 2 rails de roulement et le troisième rail d'alimentation électrique

Le premier métropolitain restera finalement une des grandes attractions de l'Exposition Universelle de Paris de 1900.

Mais son intérêt envers l'amélioration du trafic urbain dans une ville en constante expansion ne se fera pas attendre. Le métro parisien sera rapidement connu dans le monde entier et sera plébicité par de nombreuses publications à destination d'un public adulte mais aussi des enfants, comme en témoigne l'image ci-dessous.

Qui de nos jours s'interroge sur sa fourniture en énergie, sur la complexité de son fonctionnement ou sur ses systèmes aujourd'hui fortement automatisés de surveillance qui assurent à chaque instant la sécurité des passagers ?

Remercions la Fée Electricité qui a permis le développement de ce système irremplaçable de transport en commun en zone urbaine.



Le métropolitain parisien
Chromo diffusé par LIEBIG vers 1930

Un grand merci au service de documentation de la RATP qui m'a fourni des informations techniques de grandes valeur et m'a autorisé à reproduire quelques images de sa photothèque dans cette page.

Merci à mon ami François pour son aide au recueil d'informations rares sur le sujet traité dans cette page.


Et pour terminer un petit clin d'oeil au poinçonneur des Lilas !

Pour l'anecdote, ce ticket servait de marque page dans un livre "Toute la T.S.F." de L. Santoni retrouvé dans une brocante !

Il méritait bien d'apparaître sur cette page !



Ticket de Métro
vers 1930

Sources :

  1. Les sites Internet sur le sujet
  2. Métro Insolite - Clive Lamming - Editions Parigramme
  3. La photothèque de la RATP
  4. Le chemin de fer METROPOLITAIN de Paris - A. DUMAS - Ch. Béranger Editeur - Paris 1901
  5. Notre METRO - Jean Robert - Archives de la RATP - 1967
  6. Les cahiers de la mémoire - RATP N° 7 et 9
  7. Le Génie Civil - Revue générale hebdomadaire des Industries Françaises et Etrangères - Tomme XXXVIII N° 18 - 2 Mars 1901

© 2010-2012 Pierre Dessapt